Faire des liens pour bien apprendre

J'ai 15/20 en contrôles (questions de cours) mais 08/20 en DS ou en partiels !
Pourquoi certains élèves ont l'impression de travailler, d'apprendre et de comprendre leur cours mais n'y arrivent pas en évaluation ?
Pourquoi certains ont-ils de bonnes notes en interro de cours mais ne comprennent pas les exercices plus approfondis ?

Comprendre un cours en profondeur  

L'apprentissage durable et efficace repose sur la capacité à faire des liens. Ce processus d'élaboration consiste à connecter les nouvelles informations aux connaissances déjà présentes en mémoire pour un apprentissage durable et une compréhension profonde.
Le sens vient des liens construits entre les savoirs et non pas de leur empilement. […] apprendre, ce n’est pas amasser, mais c’est relier des notions pour en construire d’autres plus abstraites.
Michel Develay, Professeur en sciences de l'éducation à l'Université Lumière Lyon 2
L'importance de ces liens entre les savoirs ou plutôt le manque de liens chez certains élèves m'apparait clairement dans les accompagnements que je réalise. Et cette absence de liens est une des principales explications à un apprentissage difficile, des résultats moyens et un manque de motivation.
Les connaissances apparaissent déconnectées : maths, histoire, français... Tout se passe dans leur tête comme dans leur emploi du temps : cloisonné !

Comment permettre aux apprenants de relier : 
- ce qu'ils apprennent à l'école à leur vie quotidienne
- les matières entre elles
- les chapitres d'une même matière
Et pourquoi est-ce si important ?

Quel est l'intérêt de faire des liens quand on apprend ?

Photo de Tara Winstead: source
L'efficacité de ce principe d'élaboration de liens provient des mécanismes cérébraux sous-jacents : 
  • Relier les nouvelles connaissances à des connaissances déjà acquises favorise une compréhension profonde car on "accroche" ce qui est nouveau à un savoir déjà bien ancré.
Par exemple, on retiendra mieux un événement historique si on a déjà en tête une frise chronologique avec les différentes périodes par exemple.
En maths, le savoir est cumulatif : il faut avoir bien compris l'addition avant d'apprendre la multiplication ou la notion de "carré" avant d'aborder Pythagore, la notion de limite avant de parler de dérivée...
  • Relier des informations nouvelles entre elles permet un apprentissage à long terme. Selon le principe de Hebb, "les neurones qui s'activent ensemble se connectent ensemble". Ainsi, la connexion entre ces nouveaux apprentissages sera plus forte. (Hebb D.O, The organization of behavior ; a neuropsychological theory. 1949)
Il est ainsi plus facile d'apprendre du vocabulaire en faisant un lien entre les mots que d'apprendre ces mots séparément. Par exemple, en les regroupant par famille (par thème ou par nature : noms, verbes, adjectifs...)
exemple verbes irréguliers
  • Faire des liens entre des informations similaires facilite la récupération en mémoire de ces informations. Plus un concept sera relié à d'autres, plus il sera facile de s'en souvenir.

Pré-requis

Ce qui vient d'être dite sur les mécanismes neuronaux d'un apprentissage sous-entend qu'il est important d'avoir déjà des connaissances pour faciliter l'arrimage de nouvelles informations. Plus les connaissances antérieures sont nombreuses et solides, plus il est facile d'en acquérir de nouvelles.
D'où l'importance de posséder un vocabulaire riche et varié (voir autres articles de blog consacrés au sujet), ce qui permet de comprendre et de relier facilement des nouveaux concepts.
Et ce qui explique aussi les écarts entre les enfants selon l'environnement linguistique et culturel dans lequel ils baignent.
Une personne ayant peu de connaissances aura plus de difficultés à comprendre et à mémoriser des définitions et des informations de base car elle ne peut pas les associer à une notion familière pour ensuite tisser un réseau.
L'étude, résumée graphiquement ici à droite, montre que le taux d'apprentissage est nettement plus élevé lorsque l'on possède des connaissances antérieures élevées, quel que soit le mode d'apprentissage utilisé (Elaboration d'explications / Lecture).

(Steve Masson, Elaborer des explications, est-ce vraiment efficace ?)

Comment faciliter la création de ces liens ?

Elaboration d'explications

Le principe est clair : au lieu de demander "quelle est la formule pour calculer l'aire d'un triangle ?", demandons plutôt : "pourquoi cette formule ?"
  • Devoir répondre à cette question impose de : récupérer en mémoire les connaissances (aire d'un rectangle...)
  • faire appel à des notions plus larges : base, hauteur...
  • relier la surface d'un triangle à celle d'un rectangle
Le simple fait d'expliquer un concept permet d'activer les mécanismes cognitifs déjà décrits, très puissants en termes d'apprentissage : 
  • activer différents neurones : ceux liés à la notion travaillée et ceux liés à des notions connexes et donc cela permet de relier ces connaissances entre elles
  • renforcer ces connexions : plus on active, plus on renforce !
  • faciliter la récupération en mémoire le moment venu et donc éviter le stress de la page blanche ! Plus une connaissance est reliée à d'autres, plus il existe des chemins pour la retrouver.
  • favoriser la compréhension profonde et donc permettre de transférer ces nouveaux apprentissages dans un contexte différent. C'est un point essentiel ! Combien d'élèves se retrouvent démunis dès que l'énoncé d'un exercice est différent de celui travaillé en cours.

Organiser les informations

La première étape avant d'apprendre est de commencer à organiser les informations ! Ce travail va grandement faciliter la tâche du cerveau par la suite.
Les concepts ainsi classés en mémoire seront bien plus faciles à retrouver et à connecter avec d'autres pour continuer à apprendre.
Prenons l'exemple des verbes irréguliers, souvent fournis sous forme de liste alphabétique. Les éléments (verbes) sont isolés, sans lien logique entre eux et leur nombre surcharge notre mémoire de travail.
Une logique de classification peut être de les regrouper en fonction des similitudes entre infinitif / prétérit / participe passé, puis en fonction de leurs terminaisons : tous les verbes identiques pour les 3 formes (cut/cut/cut), ceux qui sont identiques au prétérit et p.passé... 
Cette logique et le fait de ne plus avoir 30 ou 40 verbes à apprendre d'un coup mais 5 groupes de 6 verbes chacun change complètement le travail d'encodage et de récupération par la suite.

Faire des analogies

Vous avez peut-être déjà lu, dans ce blog ou ailleurs, le parallèle que l'on établit entre l'intérêt de renforcer les connexions entre les neurones et le fait d'emprunter un sentier en forêt. 
 Plus on parcourt ce chemin, plus il s'éclaircit. De même, dans notre cerveau, plus on réactive une connaissance, plus les connexions se renforcent. Ce chemin neuronal sera rapide et sûr.
Cette analogie permet de bien saisir cette notion de renforcement des connexions car nous avons tous en tête des images de sentiers plus ou moins dégagés et faciles à emprunter. L'analogie est un processus qui met en relation une situation nouvelle avec une situation bien maîtrisée. C'est un procédé utile pour faire comprendre un concept relativement complexe.
Autre exemple, l'analogie entre l'intensité d'un courant électrique et le débit d'un flux d'eau.

Créer des histoires

Créer des histoires, par exemple en histoire ou en sciences, peut être judicieux pour capter l'attention, faciliter la compréhension et la mémorisation d'un événement ou d'un concept (en racontant par exemple une expérience scientifique ayant débouché sur une nouvelle découverte ou le contexte historique). Grâce une histoire, nous saisissons plus facilement les liens de cause à effet entre les événements.

Utiliser des outils visuels

Si vous avez l'habitude de me lire, vous connaissez mon intérêt pour les outils de pensée visuelle comme le Mind Mapping. Ces outils sont particulièrement pertinents lorsqu'il s'agit de rendre visibles des connexions, des liens entre des idées.
Plusieurs façons d'utiliser des synthèses visuelles : 
  • Créer une carte mentale en synthèse de cours ou en synthèse d'un document en disposant les idées principales sur les premières branches et les idées secondaires sur les suivantes. Les liens entre les informations apparaissent au fur et à mesure et peuvent être complétés en cours de route. C'est une très bonne façon de bien comprendre son cours et de commencer à le mémoriser.
  • Utiliser cette Mind Map pour réactiver son cours : on cache les branches, on essaie de retrouver les informations, on restitue les connaissances à voix haute.
  • Réaliser une Mind Map avant de travailler sur un sujet pour restituer tout ce que l'on connait sur ce thème.

Prendre des notes manuscrites

En termes d'efficacité pour comprendre et retenir des informations, toutes les prises de notes ne se valent pas !
Noter à la main est plus lent, ce qui nous oblige à bien analyser le discours et à sélectionner les informations les plus importantes. Un véritable travail d'élaboration est à l'œuvre !
En conclusion et en toute cohérence ;-), voici un résumé en Mind Map des différentes façons de créer des liens lorsque vous apprenez de nouveaux concepts, lorsque vous devez traiter un ensemble d'informations.
Ce sont les liens qui existent entre nos connaissances qui constituent notre intelligence, notre compréhension du monde et notre mémoire. Tout ce qui permet de connecter, de relier les informations entre elles, de faire des parallèles est à travailler. Notre cerveau n'est pas constitué de dossiers indépendants mais d'un réseau de connexions. C'est ce travail d'élaboration de liens en profondeur qui nous permet de maitriser un concept et de l'appliquer dans toutes sortes de situations.

Sources :

  • Steve Masson : Etablir des liens pour mieux apprendre (https://www.youtube.com/watch?v=A-OyXMqQHhI)
  • https://fr.wikibooks.org/wiki/Psychologie_cognitive_pour_l%27enseignant/L%27%C3%A9laboration_:_faire_des_liens
  • https://www.swiss-lingua.ch/faites-des-liens-apprenez-plus-vite-et-de-maniere-durable/
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